Alors que dans la rubrique « Sciences pour tous » l'abbé Th,Moreux nous explique les influences de notre satellite sur les intempéries de la terre, le diable d'homme, avide des espaces intersidéraux, dépêche son plus brillant reporter, Julius Snow afin de percer les mystères de Mars dans la pré-originale de son roman « Le miroir sombre » et intitulé pour l'occasion dans ce N° 1 de « Le journal des voyages » Nouvelle série « Mars va vous parler », Pendant ce temps et comme si le menu n'était pas suffisamment chargé, Guy de Téramond, directeur littéraire du journal, auteur du célèbre « L'homme qui peut tout » ( Éditions Vermot1900, réédité sous le titre « Le miracle du Pr Wolmar » ,éditions du monde illustré 1910),de « L'homme qui voit à travers les murailles » (Editions Tallandier « Les romans de Guy de Téramond » 1923) et de « Ravengar » (Editions Tallandier « Les romans de Guy de Téramond » 1922), se paye le luxe de nous gratifier d'une roman inédit en volume où il aborde une toute nouvelle thématique dans sa carrière déjà bien remplie : celle du continent mystérieux abritant les vestiges d'un animal préhistorique avec « A la recherche du plésiosaure » (Du N°1 du 16 Octobre 1924 au N°29 du 30 Avril 1925), Guy Costes me signale en passant que cette aventure est une version « allongée » d'une première mouture ( ou est-ce l'inverse?) du fascicule N°17 de la série en 25 livraisons de « 20 000 lieues à travers le monde » (éditions Ferenczi 1923/2.
Mais ce N°1 est aussi l'occasion de découvrir une nouvelle « extraordinaire » du Captain George, entre fantastique et science-fiction, abordant la thématique de la greffe d'un organe animal sur un
être humain, Même si l'auteur reste des plus « chiche » sur les explications, le fait est cependant assez rare pour qu'il ne soit pas mentionné dans les pages de ce site. Dans cette nouvelle et
contrairement au roman de Paul Féval fils dans son diptyque « Félifax » ( « L'homme tigre » et « Londres en folie
» éditions Baudiniére 1929 et 1930) les yeux que possèdent l'infortuné de ce court récit lui seront greffés, alors que ceux de Félifax, sont obtenus par transmission génétique . Utilisée
dans de nombreux romans mais principalement au moyen d'un organe d'être humain, il semblerait que la l'application la plus fréquente, soit celle utilisée pour transformer quelques malheureuses
victimes en amphibien comme ce fut le cas pour « L'homme qui peut vivre dans l'eau » de Jean de la Hire, « La guerre
des océans » de José Moselli, « La proie de la sirène » de René Thévenin ou du « Mystère de l'île aux
phoques » de A .Charpentier. H.J.Magog utilisera quant à lui les grands moyens avec un transfert pur et simple d'un organe entier, en l'occurrence le cerveau dans son roman « L'homme qui devint gorille » au titre suffisamment explicite (EditionsOlendorf 1921), Curieusement comme poussés par le besoin de vouloir affirmer la supériorité
de l'homme sur l'animal, les auteurs vont préférer choisir de donner plus d'humanité à l'espèce animale, plutôt que l'inverse, souvenons nous de « L'ile du Dr Moreau
» de Wells et des nombreux exemples où certains scientifiques s'efforcent de donner un ersatz de nos caractéristiques à l'espèce animale la plus « malléable », Le singe. Ici également les
exemples pullulent : « La révolte des esclaves » de Maurice Haime,« L'expérience du Dr Hortner » de
Maurice Perot,« Balaoo » de Gaston Leroux.....mais je vous invite à lire mon article sur cette autre passionnante thématique en allant sur la page
consacrée à Maurice Haime « La révolte des esclaves » dans la rubrique auteur
Voici donc cette nouvelle qui, bien que relativement brève ne manque pas d'audace et distille une note de mystère où, une fois n'est pas coutume, l'amour sera la trame d'une effroyable tragédie.
« L'homme aux yeux de tigre » du Captain George, Paru dans le « Journal des Voyages » Nouvelle Série N°1,16 Octobre 1924
Ceci se passa dans les Indes Anglaises, les Indes mystérieuses des Radjahs, où les tigres viennent boire l'eau sacrée du Gange, argentée parles rayons de la lune.
Nommé lieutenant, je venais d'y rejoindre ma garnison et faisais, souvent, de longues randonnées à cheval, à travers ce pays inconnu, dont chaque coin était pour moi un enchantement nouveau.
Un soir, je me laissai surprendre par le crépuscule et, faisant demi-tour, me préparais à rentrer rapidement quand, d'un fourré, à quelques pas de moi, déboucha un homme de haute taille, le fusil en
bandouillère et portant d'épaisses lunettes de chauffeur d'automobile, dont les godets hermétiques ne laissaient rien passer de ses regards.
Ma monture esquissa un brusque écart sur le côté, mais je la contins. L'inconnu était un Européen qui me salua d'un geste cordial.
Les présentations furent courtes et je sus bientôt qu'il s'appelait William- Gérard Buxley.
Puis, me désignant de la main le toit bas d'un bungalow dans la brousse :
Voici ma demeure, ajouta-t-il... Voulez-vous me faire le plaisir d'accepter une tasse de thé ?... Je vous raconterai une bien curieuse histoire...
Et tout à coup, poussé par un besoin irrésistible de confidences, il commença :
C'est ici que je vis pour la dernière fois Daisy, ma fiancée... elle était venue passer la journée avec ses parents... Puis la nuit tomba... c'était l'heure du départ... J'accompagnai mes hôtes
quelques instants à travers la forêt... enfin, je les quittai... À peine m'étais-je éloigné que j'entendis des cris terribles... je retournai sur mes pas... Ce fut pour apprendre qu'un tigre avait
bondi d'un fourré, enlevé Daisy de son poney et disparu avec elle...
Il demeura silencieux un moment, la gorge serrée d'émotion, puis continua.
Sachant que le tigre revient toujours flairer les traces de ses victimes, je fis creuser, le lendemain, une fosse profonde, le long du sentier, en recommandant à mes boys de ne la point garnir,
selon la coutume, de bambous effilés et j'y plaçai un jeune chevreau pour servir d'appât. Le tigre accourut, sauta et fut pris vivant, sans une blessure.
Un mois plus tard, je l'emmenai avec moi en Angleterre...
Mais que m'importaient son poil, chatoyant sur son ventre comme du givre au soleil, et les rayures rousses de sa robe ondulant ainsi que des reflets de flamme sur l'eau calme d'un lac ?
Seuls, ses yeux m'obsédaient, ses yeux qui avaient absorbé les regards suprêmes de ma Daisy bien-aimée; et, le soir, dans les ténèbres, je me. glissais près de sa cage pour contempler leurs lueurs
étranges.
Ah, Monsieur, vous ne savez pas ce que c'est que des prunelles de tigre qui s'allument dans l'obscurité comme des feux follets sur la terre grasse des tombeaux ! Ce sont des lampes investigatrices
faites de rayons qui photographient l'invisible, des astres de brousse dissimulés dans la chevelure des bambous, des lampyres énormes et insaisissables de rizières où les jeunes buffles aiment à
se vautrer.
Il s'interrompit de nouveau, puis reprit avec énergie :
Je m'étais juré d'exterminer tous ses semblables, mais non comme vous, avec une Winchester promenée en plein soleil derrière une barricade de bois de teck. Le tigre, my dear Sir, se tire à l'heure où
les rozelières s'inclinent et pleurent dans le vent du soir et en le regardant face à face, comme il vous regarde. Mais, pour cela, il me fallait ses yeux !
Aussi bien, j'allai trouver mon vieux camarade, le célèbre chirurgien Lewis, Sidlow... vous le connaissez, n'est-ce pas ?... Ses travaux sur la greffe animale sont universellement connus... ils
tiennent du prodige... il a greffé des pattes de souris à des oiseaux, des têtes de lézard à des carpes...
- Vous m'enlèverez les yeux et vous les remplacerez par ceux de cet animal ! lui dis-je en lui désignant mon prisonnier.
Le lendemain, il commençait.
Pendant trois mois, Monsieur, j'ai vécu appuyé contre le mufle chaud du tigre, coincés l'un et l'autre dans un appareil qui nous interdisait tout mouvement, dont le moindre eût rompu la fibre fragile
des nerfs optiques qui nous liaient.
Enfin, mes yeux desséchés tombèrent de mes orbites sanglantes où s'étaient encastrés lentement ceux du félin, voyez !
Brusquement, mon interlocuteur leva ses lunettes noires et j'étouffai un cri.
Il m'enveloppait avec des yeux terrifiants, des yeux de tigre qui, en guise de prunelles, avaient deux globes phosphorescents dont la flamme verte brillait avec un éclat impitoyable dans la nuit
qui nous enveloppait, épaisse maintenant.
Et il répéta, farouche :
- Le tigre se tire face à face, Monsieur, en le regardant comme il vous regarde !...
Ma visite avait assez duré. Je me levai et, lui ayant serré la main, sautai à cheval et m'éloignai au galop.
Quelques jours plus tard, j'assistai à la chasse nocturne aux fauves qu'avec tout le faste que déploient les princes hindous en ces circonstances, le Maha-radja de Rapoutama offrait aux
fonctionnaires et aux officiers de sa province.
- Venez donc, George, me dit le major Patrick Reynold, quand il m'aperçut... je vous cherchais... je vais vous présenter à notre nouveau gouverneur et à Lady Daisy Dutterton, sa jeune femme, arrivés
hier d'Angleterre.
- Daisy ? m'écriai-je, troublé.
- Vous la connaissez ?
- Non... mais il y a quelques jours, on m'a raconté l'aventure romantique d'une jeune fille de ce nom qui avait été enlevée, dans ces parages mêmes, par un tigre...
C'est la même !... seulement, la réalité est moins tragique... tout le monde ici connaît l'histoire... Miss Daisy échappa par miracle aux griffes du fauve et s'en tira avec une égratignure dont la
cicatrice exagère simplement la jolie fossette de sa joue droite... mais elle laissa croire qu'elle avait été dévorée et disparut de la province jusqu'à son mariage avec Ivord Dutterton...
- Et pourquoi cela? fis-je surpris.
- Pour échapper à un espèce d'original qui s'était mis en tête de l'épouser... un certain Burley ou Buxley... et dont elle ne parvenait pas à se débarrasser... il est, d'ailleurs, retourné depuis en
Angleterre, paraît-il
J'allais apprendre à mon compagnon l'étrange rencontre que j'avais justement faite, quelques jours auparavant, quand, à ce moment, arriva le foreman :
- Messieurs, nous dit-il, la chasse est interrompue. Nous avions commencé les feux de salve pour rabattre les fauves. Mais le vent s'est levé. Il n'y a plus rien à faire cette nuit. Seule, lady
Dutterton affirme qu'elle a tué un tigre. J'ai envoyé des Sikaris fouiller la brousse. Son Altesse vous attend au buffet.
Au milieu des éléphants agenouillés, dont les riches caparaçons étincelaient à la lueur des torches, le Maharadja, une coupe à la main, portait un toast à la santé de ses hôtes.
Tout à coup, une clameur prolongée annonça le retour des Sikaris.
Mais ce n'était point un félin qu'ils rapportaient sur un faisceau de branchages.
Et tandis que Lady Dutterton, éperdue d'horreur, s'évanouissait, nous vîmes avec stupeur un cadavre qui portait une affreuse blessure d'où le sang coulait goutte à goutte.
C'était l'homme aux yeux de tigre, frappé d'une balle en plein front...
Captain George
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