"Fac à face avec les monstres" de Henri Darblin
Deux éditions :
- Dans la revue « Sciences et Voyages » sous le titre « La horde des monstres » du N°479 (1er Novembre 1928) au N°485 (13 Décembre 1928), laissant la place au roman de Moselli « La guerre des océans »
- Dans la revue « Jeunesse-Magazine » sous le titre « Face à face avec les monstres » du N°20 (16 Mai 1937) au N°26 (27 Juin 1937).
L'entomologiste Paul Grismond Wild et son compagnon le policier Alain Kergy sont lancés,dans les montagnes rocheuses,à la poursuite d'un certain Herbert Millowan qui a un jour jeté dans l'hémicycle de la « Scientific Society » de Washington,les débris d'un insecte d'une grandeur prodigieuse.
Désireux d'en apprendre plus sur cet étrange personnage qui semble avoir découvert une forme de vie improbable, ces deux personnages se retrouvent au porte d'une aventure qu'ils ne sont pas prêts d'oublier. Parallèlement ils s'aperçoivent que six autres individus, pour des raisons inconnues mais probablement criminelles, sont également à sa recherche.
En fait une bonne partie de l'histoire se déroule dans le désert où les personnages nous livrent le récit de la vision cauchemardesque de ces insectes géants (Abeilles, scorpions, mante religieuse, calicurgue et autres lycoses) qui déciment peu à peu les infortunés bandits dont un seul parviendra à s'échapper pour sombrer dans la folie. Les scènes d'attaque sont particulièrement violentes et sanglantes pour une revue destinée à la jeunesse :
« La victime ne bougeait presque plus. Le tueur d'une soudaine pression de ses mandibules sur la nuque, força la tête du malheureux à se renverser. L'abdomen de l'insecte se recourba de nouveau et le temps d'un éclair, les deux hommes virent le dard, gros comme une alène de cordonnier, plonger dans les chairs du cou tendu. Un dernier spasme agita l'homme, puis il cessa de bouger. Il ne remua plus le corps, il ne cria pas, mais ses yeux, ses lèvres crispées par une indicible épouvante, tout son masque bouleversé vivaient encore. »
Corps mutilés, abdomens éventrés, cadavres déchiquetés....un bien effroyable endroit pour passer ses vacances !
Finalement en échappant de justesse aux mandibules d'une tarentule aux proportions honorables, ils trouvent refuge dans une structure en bois où ils rencontreront le maître des lieux et objet de leur recherche. L'édifice est en réalité le laboratoire de Millowanou, en compagnie de ses deux serviteurs noirs, il réalisa une formidable expérience qui allait selon ses dires changer la face du monde. C'est un véritable fou complètement exalté par sa découverte :
« Voici l'éprouvette où se sont effectuées les réactions biologiques fondamentales ; une vie nouvelle en est sortie.... Ce tube, je l'ai trouvé par hasard, en cherchant autre chose. Sous l'action du courant électrique, dans certaines conditions de tension d'intensité...le tube s'allume, comme l'on dit, et projette alors des radiations auxquelles, j'ai donné le nom de rayon M, parce que c'est moi Milovanyi-Millowan,qui les ai découverts.
Soumis à leur influence, les tissus végétaux subissent une transformation exactement contraire à celle que produiraient les rayons X ou le radium. Alors que les émissions de ce dernier métal rongent, brûlent les tissus vivants et en arrêtent le développement, les rayons M favorisent cette croissance. Ainsi, par la seule action de la lumière artificielle, certains savants ont pu faire pousser des plantes. Mais leur développement s'arrête quand la lumière s'éteint. Au contraire avec les rayons M, le bourgeonnement des cellules continue ! De même les tissus attaqués par le radium se corrompent, se gangrènent et de proche en proche, lors même que le praticien malade a cessé de se soumettre à l'action des radiations mortelles. »
Ce diable d'homme devenait donc le maître de la taille des êtres vivants, il pouvait en accroître les dimensions à sa guise et créer autant de monstres qu'il le voulait.
Mais l'homme n'est pas disposé à partager un secret et compte se débarrasser des deux intrus qu'il a, l'espace d'un excès de mégalomanie, initié à son formidable secret.
Après les avoir rendu temporairement aveugle sous la forte intensité du tube lumineux, il les fait transporter par ses deux assistants, au milieu du désert afin de les livrer en pâture aux monstres. Il faut savoir que le savant, afin de se mettre à l'abri de ses redoutables prédateurs, a mis au point une sorte de gel, de répulsif empêchant toutes attaques mortelles. Il s'agit probablement de cette étrange odeur que les deux infortunés, avaient décelé lors de leur arrivée dans le laboratoire.
Pour l'heure c'est la panique totale, ils sont allongés dans une cuvette sableuse, au milieu de plantes qui dégagent une forte odeur de putréfaction et ils se doutent que cette puissante fragrance va attirer une horde de créatures nécrophages aux proportions peu engageantes. Fort heureusement le drame ne se produira pas, Stander le dernier des bandits que l'on croyait fou, sortira de sa « torpeur » et rongé par le remord, portera secours à nos deux infortunés. Après avoir « liquidé » les deux sbires du professeur, ils s'arrangent pour s'enduire le corps de ce fameux répulsif et prennent le laboratoire d'assaut, qu'ils vont asperger de pétrole et embraser d'une simple étincelle. Le savant à moitié carbonisé et dont le corps n'est plus sous la protection de la précieuse huile, va terminer de façon horrible sous les attaques sanguinaires de ses propres créatures :
« Il eut encore le temps de tendre le poing vers ses adversaires, vers Stander qui l'avait vaincu. IL voulut faire un saut de coté pour éviter l'assaut des monstres, mais happé par les griffes dures, jetées à terre, frappées en plein corps par le dard foudroyant, il resta inerte, tandis que les trois calicurgues se disputaient la possession de son corps. »
De retour à la « civilisation », après le récit de leurs aventures on dépêcha une expédition dans la « vallée des monstres » mais un immense affaissement de terrain, probablement provoqué par ces insectes gigantesques, avait modifié toute la géographie du site. Les insectes se sont probablement dévorés entre eux et de plus la vie de ces derniers est éphémère et comme ceux-ci vivaient à un rythme accéléré. Nulle trace et aucune preuve ne subsiste de leur effroyable aventure, il ne reste que la bonne foi qu'il nous faut accorder à leurs propos.
En matière de conclusion
Dans la conjecture ancienne, je crois que le thème des insectes et des animaux se révoltant contre l'homme, fut un sujet particulièrement apprécié. Bien souvent cet agrandissement est le fait de « savants fous » suffisamment dérangés pour croire qu'il leur serait possible de contrôler ces aberrations de la nature. Mais qu'ils soient à tailles normales ou gigantesques, ils ne suscitent souvent que le dégoût et une peur phobique. La liste des ouvrages mettant en scène ces créatures parfois peu recommandables est trop longue pour que je m'y arrête aujourd'hui, mais dans les jours à venir, je consacrerai une rubrique entière aux insectes dans l'anticipation ancienne. Le texte de Darblin, cloisonne malheureusement le cadre de son thème dans un endroit assez reculé du monde, ce qui limite un peu les débordements de ses bestioles et l'on se sent un peu frustré de ne pas les voir se propager dans une agglomération, entraînant avec elles son lot de panique et d'attaque de la population. Toutefois, si le cadre du roman se trouve relativement étriqué, l'auteur ne nous en livre pas moins des scènes assez « gores » où une fois de plus les méchants en feront les frais. Comme je le disais un peu plus haut,il est curieux de voir qu'un texte assez violent par moment dans ses descriptions d'attaques d'insectes, et qui à l'origine publié dans « Sciences et voyages »,fût réédité dans une revue comme « jeunesse magazine » et ce,dans son texte intégral.
Mais la plus grande particularité de cette reprise concerne sans nul doute le choix de l'illustrateur, qui au fil des sept numéros que dura ce roman, nous offre une fois de plus le talent de ce dessinateur hors pair qui oeuvra à maintes reprises dans notre domaine de prédilection : René Pellos !
Lorsque l'on a sous les yeux les illustrations de « Sciences et Voyages » et celles de « Jeunesse-Magazine » la différence est écrasante. Cela vient bien évidemment et j'en conviens, d'une mise en valeur grâce à l'utilisation de la couleur,mais également et surtout par le réalisme de chaque illustration où le trait n'est pas figé, où de chaque personnage se dégage une expression incroyable,comme s'ils allaient se mettre à parler. Le style de Pellos est vraiment unique, personnel et identifiable entre mille.
Il faut se souvenir des illustrations des couvertures de la série « Les Gangsters de L'air » de Moselli, de ses planches pour « La guerre du Feu » de Rosny Aîné, sans oublier « Electropolis » et « Novopolis ». Mais le chef d'oeuvre incontesté du dessinateur est sans contexte « Futuropolis »,d'une richesse et d'un talent incomparable : Dans un lointain futur les derniers descendants de la race humaine,vivent dans les entrailles de la terre,bien protégés par leur technologie lorsqu'un jour ils découvrent à la surface du globe l'existence d'une société « primitive » Une pure merveille, l'aboutissement de son talent tant au niveau du trait que des couleurs utilisées pour les planches, un summum de la BD que tout amateur devrait posséder.
Pellos illustra pour cette même revue de nombreuses couvertures et rédigea également en pré original, une histoire sous forme de « bande dessinée » et qui raconte les aventures extraordinaires de « Mr Petipon aviateur » Une série très divertissante et complètement « rocambolesque »
Avant un inventaire plus poussé des insectes en littérature, voici une petite « mise en bouche »
Petite bibliographie sélective de quelques gros insectes en anticipation ancienne :
- « Spiridon le muet » de André Laurie Pré originale dans le « Globe trotter » du Jeudi 6 Décembre (N°253) au Jeudi 28 Mars (N°269). Réédition en volume aux éditions Rouff, sans date avec des illustrations de Damblans. (Il existe un cartonnage « muet » et un autre avec une illustration sur le premier plat). Histoire de Fourmi de taille humaine ayant développé une super intelligence.
- « Le péril bleu » de Maurice Renard. Editions Michaud 1911 pour la première édition. Le doute se pose sur l'appartenance de ces créatures « extra-terrestres » à l'espèce des araignées. Peu importe, le roman est excellent.
- « Les premiers hommes dans la lune » de Herbert Georges Wells. Editions du Mercure de France 1911. Sur la lune, une race d'insecte vénère des larves géantes
- « L'adversaire inconnu » de Cyril Berger. Ferenczi 1922. Incroyable insecte recouvert de lamelles de chitine, il possède en outre deux ailes repliées sur son dos. Sorte de « vampire de l'espace » suçant de malheureuses victimes pour sa survie, une fort belle réussite dans le genre.
- « L'abîme » de E.M.Laumann. Nouvelle parue dans « L'aventure » N°24 Fayard, 1er Décembre 1924. Réédition « Laumann, contes de terreur » Collection « Idées...et autres » Editions « Recto Verso » Anthologie dirigé par Marc Madouraud 1994. Le héros est au prise avec des araignées vampires.
- « Le guerrier de Vénus » (The radio man) DE Ralph Milne Farley. Première édition dans « Argosy » 4 épisodes à partir du 28 Juin 1924. Première édition Française dans la revue « Ere comprimés » du N° 31 au N° 35. Réédition par J.P Moumon dans la collection « Périodica » N°4, Juillet 1993. Sur une autre planète, le héros va vivre d'extraordinaires aventures dans une civilisation de fourmis. A quand la suite ?
- « La révolte des monstres » de Norbert Sevestre. Editions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » 1928. Araignées géantes produites par expériences, un jour elles sortent de leurs cages.
- « La horde des monstres » de Charles Ronze. Collection « Sphynx » série policière N°20. s.d (vers 1930). Un savant un peu « distrait » libère des insectes géants dans la campagne du Puy de Dôme...c'est la panique !
- « Un mois sous les mers » de Tancrède Vallerey. Editions Nathan 1939.Un fragment d'une autre planète tombe sur la terre, des explorateurs découvrent une bien étrange civilisation d'insectes géants.
- « Le monstre de la St Basile ».de J.P Besson. Collection « Stick » (roman policier) Agence Parisienne de distribution 1941. Une mouche gigantesque et carnivore, fruit d'une expérience innommable, sème la terreur dans nos campagnes.
- « L'araignée de l'île » de Pierre Jouvet. A compte d'auteur 1942. Il existe au moins trois éditions. Sur une île déserte un homme face à une créature gigantesque.
- « Le monstre des Black Mountains,un aventure de Captain Chester du spécial Quad » Editions « revue Française » fascicule illustré par Dansler 1945. Des créatures larvaires et répugnantes.
- « La ruée des monstres » de Daniel Girard. Dans le volume « Le mystère du Puy ». Editions Boivin et Cie 1945. Des fourmis de tailles humaines passent à l'attaque !
- « L'impossible enquête » de Pierre Jouvet. A Lyon chez l'auteur 1946. L'édition se présente sous deux formes différentes. L'araignée géante...le retour (avec en prime toutes ses petites sœurs)
- « Les catacombes infernales » de L.Van der Haeghe et Jean Des Marchenelles. Collection « Notre rêve » 1944 Encore une araignée gigantesque et affamée.
Trois petits « Fleuve noir »,plus un autre pour le Fun !
- « L'infernale menace » de Vargo Statten. Editions fleuve noir collection « anticipation » N° 23 ,1953. Fourmis de tailles humaines, œuvre d'un savant fou, menacent la race humaine.
- « Expédition épouvante » de Benoît Becker. Fleuve noir collection « Angoisse » N°4,1954. Réduction de la taille d'humains donc augmentation de celles des araignées.
- « Désert des spectres » (The solidary hunter) de David Henry Killer .Editions fleuve noir collection « Angoisse » N°5 1955. Guêpes géantes
- « La cité sous la terre » (The ants man) de Eric North. 1955 pour l'édition originale, en France Hachette collection « point rouge » 1972. Fourmis de tailles humaines vivant avec d'autres insectes dans une région isolée du globe
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