« La Cellule De La Mort » de P.Straitur: Le Rayon De La Foi…
Roman de Pierre Straitur. Editions Fleurus. Collection « Cœur vaillant » .1947. (Bulletin des amateurs d'anticipation ancienne et de littérature fantastique N° 28. Juin 2002)
Jean Prot , génial inventeur et Parisien de surcroît, vient de mettre au point une arme révolutionnaire : La cellule de la mort ! Celle-ci est capable de produire un rayon terrifiant plus connu sous le nom de « onde de la mort ». A petites doses, elle assomme ses victimes, en tournant un petit peu plus le bouton : C'est la muerte !
Mais tout ceci serait d'une banalité affligeante, si entre autre qualité, il ne possédait pas celle de stopper net tous les véhicules, qu'ils soient électriques ou à essence. En bon patriote, le savant offre ses services à la défense nationale, qui va ainsi lui débloquer un budget colossal. A court terme, l'objectif sera de construire un engin possédant un rayon d'action de 50 Kms, mais également de produire un blindage spécial afin de protéger nos propres véhicules. Pour cette formidable entreprise, le professeur trouvera une aide précieuse en la personne de Pierre Bonal, un brillant polytechnicien. Orphelin, ce dernier sera adopté par Prot, histoire de livrer un passage riche en cascades lacrymales.
Mais dans l'ombre comme il se doit, une autre grande puissance complote et s'organise : « La ligue universelle révolutionnaire internationale », dont le mot d'ordre est « Partout et nulle part ». Forte d'un réseau aux multiples ramifications, véritable pieuvre dont les tentacules s'étendent sur toute l'Europe, son unique désir est de s'approprier la formidable invention. Dépêchant deux agents « Poltok » et « Koutak » dans une tentative des plus audacieuse, la mission se soldera par un échec cuisant, éveillant ainsi l'attention de ses adversaires. Le temps passe, trois appareils vont être construit dans le plus grand secret.
Les premiers tests sont plus que concluants. Postés sur la tour Eiffel, les deux savants, sous le regard ébahi de l'état major, parviennent à immobiliser un bataillon de chars et à clouer au sol toute une escadrille. Les militaires exultent, la machine est opérationnelle sans compter qu'on leur livre en plus une cote de maille ultra légère pouvant protéger hommes et matériel. Hélas, profitant de l'euphorie générale et d'une baisse de la sécurité, la « LURI » capture nos deux inventeurs. Ils se retrouvent ainsi prisonniers à 100 mètres de profondeur prés du massif de la Sainte Baume. Trop de pression ou folie passagère ? Prot change son fusil d'épaule et se rallie à la cause des gredins.
Peut-être se laisse t-il facilement influencer par ses ravisseurs qui lui affirment que les intentions de l'état était de se débarrasser d'eux une fois l'invention entre leurs mains. Les savants sont de grands naïfs, les bandits touchent sa corde sensible et lui affirment qu'ils utiliseront sa machine pour le bien de l'humanité. Mais le but véritable est tout autre, ils veulent tout simplement lui faire fabriquer un appareil suffisamment puissant pour attaquer la capitale en immobilisant dans un premier temps, tous ces moyens de locomotion. Un troisième ingénieur va donc se joindre à eux, pour accélérer la fabrication de l'appareil.
Au départ Bonal voit tout cela d'un mauvais œil, pour finalement se laisser amadouer par le sympathique petit nouveau. Un rapport de confiance s'installe entre les deux hommes et un jour Rapten décide enfin à se confier. Destiné à une brillante carrière celui-ci avait un terrible défaut : Le jeux. Il lui fallait de ce fait de l'argent dans les plus brefs délais et se laisse donc convaincre par les propositions de la « LURE ».C'est une homme bon qui se dévoile ainsi et pour gagner le prix de sa rédemption, il se décide à aider Robert à s'évader. Ils s'occuperont du Professeur plus tard, car sa confusion risque de porter préjudice à la mission La fuite se fera par une rivière souterraine, peu gardée et facilement accessible .
Après maintes péripéties, les évadés débouchent dans une immense grotte sur un plateau proche de la Sainte Victoire. Les autorités seront aussitôt alertées, mais il va falloir « jouer serré » car Jean est toujours captif. Des hommes de l'espionnage Français repèrent rapidement la cache des bandits qui utilisent une ferme comme quartier général. Afin de ne pas éveiller l'attention et s'approcher du professeur, les deux hommes se font passer pour des Américains, représentants en machines agricoles. Bonal sera vite démasqué, ficelé et conduit, une cagoule sur la tête, dans le laboratoire de son père adoptif. Profitant de la confusion de savant un des malfrats fait croire à Prot que l'homme cagoulé est un opposant à sa merveilleuse invention. Naïf, il va prendre la mouche et décide de tester son invention sur un être vivant.
Fort heureusement l'armée va se ressaisir et donner l'assaut de la ferme,invulnérable grâce à son équipement spécial. Un commando pénètre dans le « labo »....trop tard ! le décharge vient de fuser sur la malheureuse victime. Par un coup du sort incroyable, le rayon était trop faiblement dosé et la victime ne sera que légèrement commotionnée. En découvrant son nouveau fils, le savant manque de succomber à une crise cardiaque.
Au final, tout est bien qui finie bien, une médaille sera décernée à chacun des protagonistes, les « Luristes » sont condamnés à « perpette », Pierre reçoit l'ordre de la nation, Jean la légion d'honneur : le gouvernement n'est vraiment pas rancunier...remarquez elle est décernée à des sportifs alors.... Terminons par cette phrase hautement profonde sans laquelle le roman perdrait tout son charme et son attrait :
« Mais la plus grande récompense de Pierre fut d'avoir ramené à la foi et aux pratiques chrétiennes de leur enfance.Jean Prot et Yves Rapten. La croix avait vaincu le rayon de la mort. Elle les avait rassemblés pour toujours autour de celui qui a dit « ceux qui ont confiance en moi, ne périront pas, ils triompheront même de la mort »
Scouts toujours!
Ce roman est un véritable sommet de l'endoctrinement catholico patriotique, plein à raz bord de bons sentiments religieux et d'un permanent esprit de « bon petit scout » qui ne vient pas arranger les choses. Le modèle exemplaire de ces publications d'après guerre dont le but était de polir les cervelles malléables de nos chers petits enfants. Il ne faut pas s'étonner à la lecture de telles monstruosités, que certains ouvrages furent mis au ban (Les aventures de « Fantax » qui viennent juste d'être rééditées et dont je vous parlais dans un billet précédent), car jugés déstabilisants et trop pernicieux pour l'épanouissement d'une jeunesse pure et vierge de toutes pensées malsaines.
Seule la foi et le patriotisme avaient un droit de regard sur l'imagination de ces jeunes lecteurs. Une époque où il ne fallait pas rigoler avec la censure qui, dans les publications destinées aux adolescents, passait au pilori tout ce qui n'était pas conforme aux valeurs judéo-chrétienne. En résumé une mise à plat et un modelage uniforme de toute une génération que l'on voudrait exemplaire. Il y aurait beaucoup à dire sur cette époque ou la soi-disant « bonne morale » voulait tout interdire, tout contrôler par des méthodes allant à l'encontre des libertés de chacun.
Bon d'accord en ouvrant un ouvrage avec un titre de collection pareil, je n'ai eu que ce que je méritais...mais tout de même, l'ouvrage est un véritable lavage de cerveau. Prenons le professeur par exemple :
« Vous avez raison Pierre, beaucoup de science m'a prouvé que dieu existe, je n'en avais jamais douté du reste, mais maintenant je crois, je vois, je suis certain que sa bonté m'assiste par sa providence »
A chaque page nous avons droit à un sermon ou à un personnage larmoyant face aux bonnes actions que chacun fait, et je passe sous silence la flamme patriotique qui anime l'ensemble des chapitres.
Que retiendrons nous de cet ouvrage, car il faut tout de même lui accorder quelques petites qualités, aussi minimes soient-elles. Un rayon qui paralyse les moteurs pouvant si besoin est de tuer son monde, une association internationale dont seul le nom original peut nous faire sourire malgré leur fâcheuse tendance à saluer comme les nazis. Dommage, l'auteur nous liquide tout cela en l'espace d'un chapitre, car il ne faudrait surtout pas générer un semblant de fascination pour l'incarnation du mal, aussi passionnante soit-elle. Au contraire la seule véritable bonne parade est de vouloir nous faire avaler que « le mal aussi puissant soit-il ne peut rien face à la détermination de la foi » Ce n'est plus un roman, c'est une véritable croisade !
Remarquez moi je n'ai rien contre la bonne morale mais à trop vouloir s'en servir pour se donner bonne conscience (le roman fut rédigé après la guerre, ne l'oublions pas) il se dégage de tout cela un petit je ne sais quoi de malsain. Finalement il n'y a pas que le rayon qui soit mortel dans ce roman.
Allez les p'tits gars, vive la France...catholique comme il se doit !
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