Roland Dorgelès et La « Machine à finir la guerre »
Dans l'anticipation ancienne, les machines ou inventions pouvant assurer une forme de suprématie totale lors d'un conflit armé, sont légions. Sur les pages de ce blog, un bon nombre d'inventeurs se sont décortiqués la cervelle afin de trouver LA solution permettant d'assurer à leur pays une victoire totale. L'avion ultra perfectionné, fut pendant très longtemps l'apanage de ces diaboliques savants qui, prenant une longueur d'avance sur leurs adversaires, trouvèrent une solution plus rapide, plus maniable et surtout plus discrète que le dirigeable : L'avion ! Mais cette arme utilisée afin de mettre un point final à toute tentative de velléité de la part de voisins trop « envahissants » rendant en cela toute guerre impossible reste beaucoup anecdotique car bien souvent les bonnes intentions finissant par s'émousser, cette arme demeure malgré tout un outil puissant de conquête. Une arme utilisée comme moyen de dissuasion, voilà une thématique qui à l'époque n'était pas chose courante et les auteurs usèrent alors de toute leur imagination afin d'apporter un peu de « piment » à une chose qui finalement arrivait d'entrée de jeu à tuer le serpent dans l'œuf. L'homme étant ce qu'il est, lorgnant toujours dans le jardin d'à coté où l'herbe est toujours plus verte, l'apparition et l'utilisation de cette fameuse arme, ne pourra se faire sans quelques petites démonstrations au préalable. Souvenons nous du roman de Norton « Les flottes évanouis » de la « Revanche fantastique » de Denay et Tassin, deux romans analysé ici même et « De la guerre finale » de Barillet Lagargousse, à venir d'ici quelques jours. L'autre arme « révolutionnaire » qui fut utilisée avec une largesse qui confère au plagiat, est le fameux rayon pouvant soit neutraliser les moteurs des engins de guerre, soit un autre pouvant faire exploser à distance la moindre parcelle d'explosif. Si la première se révèle déterminante pour clouer les avions au sol aussi bien au décollage qu'un fois dans les airs, cette merveilleuse invention ne pourra par contre être d'aucune utilité sur les canons qui dans ce genre de tête à tête ne manquent pas d'arroser copieusement les lignes adverses, d'où l'utilité de la seconde de ces inventions.
Dans le petit résumé qui va suivre, extrait de « Guerre et révolution dans le roman français 1919 1939 » de Rieuneau Maurice (Paris, Klincksieck, 1974) l'auteur nous parle du roman de Dorgeles écrit à quatre main avec Régis Gignoux « La machine à finir la guerre » et qui évoque justement cette thématique. Si le roman s'articule autour de cette invention pouvant faire exploser la poudre à grande distance, ici tout n'est que le prétexte à la satire et surtout permettre à l'auteur des « Croix de bois » de nous livrer quelques scènes assez troublantes et douloureuses de ce que fut l'enfer des tranchées. Il est également coupable d'une autre œuvre conjecturale « Si c'était vrai ? » parue aux éditions Albin Michel en 1934.
Ce petit article est également un moyen détourné de vous faire admirer la splendide illustration qui accompagna la parution en pré originale dans la revue « L'heure » avant d'être publié en volume chez Albin Michel en 1917. Bien que jouant sur le coté sensationnel de la « Machine » qui ressemble plus à un tripode Martien de « La guerre des mondes » de Wells qu'a un banal engin capable de faire exploser la poudre à distance, l'effet étant ici d'attirer l'œil du lecteur. Comme quoi l'impact visuel comme argument de vente fut et restera toujours déterminant en tant qu'outil de marketing.
Extrait:
« En 1917 il écrit en collaboration avec son ami Gignoux, un roman satirique sur la guerre « La machine à finir la guerre ». Ce livre lui était demandé par le rédacteur en chef de « L'heure », Maurice Sorton, ami du journaliste, qui le destinait à son feuilleton. Il fut écrit en quinze jours, par un sujet trouvé par Gignoux. Dorgelès s'était chargé de la seconde partie, qui conduit les personnages au front, et lui donna l'occasion de décrire rapidement les tranchées et le spectacle de la guerre. En fait, cette œuvre appelée par Dorgelès « Roman satirique », tient plus de la farce que de la satire, tant les effets sont gros et le thème invraisemblable .Il s'agit d'une machine merveilleuse qui serait capable de mettre fin à la guerre en faisant sauter simultanément tous les explosifs situés à une distance de cent kilomètres. Son inventeur n'a pu la construire faute de capitaux, et l'on ignore d'ailleurs qui il est, son existence n'étant révélée que par une annonce publicitaire veille de plusieurs années, que trouve par hasard un bourgeois naïf et patriote, Mr Toulevent. La première moitié de ce livre, écrite par Gignoux, passe en revue les divers milieux Parisiens pour montrer que personne ne souhaite mettre fin à la guerre en retrouvant l'auteur de cette merveille. Des aventures causasse conduisent Toulevent chez le faux maréchal Z. chroniquer militaire d'un grand quotidien, chez une actrice, chez le cardinal-archevéque de Paris, chez un ancien président du conseil, chez un journaliste cocardier dans lequel on reconnaît la caricature de Gustave Hervé, chez un homme politique patriote qui pourrait bien être Clemenceau et ainsi de suite. Tous ont de bonnes raisons de refuser leur patronage.
L'héroïque Toulevent va donc s'engager dans une troupe de théâtre aux armées pour rechercher au front l'inventeur dont il a retrouvé la trace. Dorgelès devait prendre ces personnages à la gare de l'est pour les conduire au front que Gignoux n'avait pas vu.
Le voyage de cette troupe, vers le front est l'occasion de décrire en le ridiculisant, l'enthousiasme patriotique des comédiens qui jouent les mêmes scènes d'épopées de puis le début de la guerre. Les deux vedettes féminines s'entre-dévorent car l'une chante la Marseille sur scène et l'autre la déclame. Mais dans le chapitre XI « Plus prés de la guerre ou du roman à la réalité » plonge brutalement les civils dans la guerre. Toujours à la recherche de l'inventeur génial, Toulevent et son compère Vingdoix fournisseur aux armées, cheminent à travers les lignes, morts de peur à chaque éclatement d'obus. Dorgelès trouve là prétexte à décrire les tranchées, les bruits, les couleurs du front,les scènes de la vie des soldats. On est déjà tout prés des « Croix de bois » par le ton de description réaliste qui fait oublier pour un temps l'intrigue invraisemblable et la satire. On assiste même à un bref engagement, fusillade au cours de laquelle Chartier, l'inventeur est blessé.
La suite retrouve la veine satirique du début, Chartier sera soigné, guéri et remis au travail. Sa machine expérimentée, donne satisfaction. On sollicite de gros fabricants d'armements pour qu'ils la construisent ; mais ils refusent hargneusement l'un après l'autre, de ruiner ainsi la source de leur scandaleux profit. La guerre doit durer ! Construite enfin par les services du ministère de la guerre, la machine va entrer en action, sous les yeux du grand quartier général rassemblé à ses pieds, lorsqu'on apprend que l'ennemi demande l'armistice. »
Maurice Rieuneau
« La machine à finir la guerre » de Roland Dorgeles et Régis Gignoux. Editions Albin Michel.1917. Il existe également une édition avec une couverture illustrée
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