« L’Etrange Aventure De Pierre Fontramie »… Une Histoire De Monde Perdu et Retrouvé!
J.L.Gaston Pastre. Société de la revue « Le feu » 1920 (Bulletin des amateurs d'anticipation ancienne et de fantastique N°18 Juillet 1997)
Pierre Fontramie, jeune et dynamique aventurier, reçoit un beau matin une invitation du mystérieux duc de Palerme. Celui-ci vient de le convier à participer à une exploration aux confins du Tibet. Dégagé de toute contrainte, il accepte avec enthousiasme cette proposition.
A Tripoli, après un voyage sans encombre, il est reçu par un élégant officier qui l'invite à prendre place dans une étrange embarcation afin de le conduire sur l'île de Yerta. Arrivé à destination, il fera la connaissance du duc ainsi que de quelques un de ses amis dont le plus extraordinaire semble être le professeur Lauricci. C'est un génial inventeur, dont l'aspect très banal, cache portant un brillant cerveau. Ainsi, c'est lui qui bouleversera la vie des habitants de l'île, ou tout fonctionne à l'électricité mais surtout il est le génial inventeur d'un nouveau métal : le Palernium. Possédant des caractéristiques extraordinaires, il équipe entre autre un magnifique mono rail, moyen de transport le plus utilisé dans ce havre de paix.
Toutefois le couronnement de cette fabuleuse visite se fera lors de la visite de la « Rondine », un avion de 180 mètres de large. Cet immense oiseau métallique aux ailes prodigieuses possède un équipement dépassant en perfectionnement technologique ce que la science de l'époque peut fournir à la civilisation. Des moteurs actionnés à l'électricité cela va de soi, mais avec une autonomie illimitée car recevant directement la précieuse énergie d'une immense centrale se trouvant sur l'île. Le fluide est ainsi « véhiculé » par un système d'ondes électromagnétiques. C'est à bord du puissant appareil que le voyage va s'effectuer.
Le jour du départ, le « Rondine » s'élève majestueusement dans les airs et Fontramie découvre alors quelques unes des merveilles du bord comme cette gélatine vitrifiée, souple et translucide et pratiquement invulnérable. Elle permet en outre la transmission des vibrations de la voix lorsque l'on parle avec un masque à oxygène : utile à très haute altitude.
Le voyage se poursuit à la limite monotone (pour eux comme pour le lecteur) et chaque pays traversés donne suite à d'interminables dissertations philosophiques. Fort heureusement le Tibet est enfin en vue lorsque l'avion est soudainement frappé par un gigantesque éclair le forçant à se poser dans une immense et providentielle clairière. Mais l'atterrissage ne se fait pas sans quelques sueurs froides car il faut à l'appareil éviter d'imposantes falaises. Cette zone est véritablement cachée au cœur d'une majestueuse chaîne de montagnes.
Au sol, chacun s'occupe comme il le peut et Pierre en profite pour mener une petite exploration du site. La curiosité étant un vilain défaut l'aventurier sera enlevé, ainsi que l'ensemble de l'équipage, après avoir sombré dans un sommeil artificiel. Le réveil se fera en douceur, la bouche pâteuse certes mais en présence de curieux individus, habillés de façon fort étrange et parlant semble t-il...le Grec ancien ! Il leur faudra plusieurs jours de captivité pour que le mystère perde un peu de son épaisseur.
La population de cette vallée, provient d'un corps expéditionnaire Gréco Romain fort de 15000 hommes et traînant avec lui femmes et enfants et qui fut coupé de l'armée principale de l'empereur Julien alors en campagne contre la Perse. Pour des raisons »mystérieuses », ils se retrouvèrent après un long périple dans cette contré située aux premières pentes du Tibet où ils fondèrent une colonie. Par la suite,un cataclysme ferma complètement l'unique passage menant à la vallée. Malheureusement, les nouveaux venus ne sont pas perçus d'un bon œil, la voie des airs est celle qu'emprunte les démons, mauvais présage...destin funeste ! Il ne restera plus qu'au sénat de décider du destin des infortunés naufragés, rien de bon en prévision.
Le sort va se jouer sur un incroyable coup de hasard où Fontramie sauve de la noyade un des « principaux » de la cité, permettant ainsi un sursis et une relative liberté à nos rescapés. Les journées s'écoulent paisibles et monotones, dans une contrée aux allures idylliques et petit a petit, la curiosité laisse place au désespoir. Le mal du pays commence à se faire sentir avec le sénat qui parle de plus en plus de détruire la « Rondine ». Celui-ci pense que la technologie ainsi apportée ne peut que nuire à leur société ou toute forme d'évolution est exclue. Fontramie lui, fait un peu la sourde oreille car il est en train de vivre le parfait amour avec Arkaïa, si douce que son nom est aussi celui de la colonie.
Du coté de l'équipage, des plans d'évasion commencent a s'échafauder, deux hommes téméraires tenteront même une fuite par les airs, peine perdue car leur bonne volonté finira écrasée sur le sol. Un passage possible sera découvert prés d'un volcan mais celui-ci est impraticable. Leur désespoir ne fera que croître lorsqu'au retour ils contempleront les « restes » de la « Rondine » entièrement démontée et saccagée. Peu de temps après, une nouvelle menace gronde, du coté des éléments cette fois, le volcan manifeste quelques signes d'activité.
La population murmure que la colère des dieux est attisée par la présence des étrangers. Dans la panique générale, Fontramie n'a pas que des ennemis et apprend l'existence d'une galerie creusée dans la falaise et réalisée au début de la création de cette communauté. Entreprise de façon clandestine, à l'époque les ouvriers furent tous empoisonnés, et le tunnel rebouché. Aidés par l'éruption soudaine du volcan qui débloquera de manière accidentelle cette issue salvatrice, les deux amants s'échappent, en compagnie de l'équipage, dans une course effrénée laissant derrière eux, un peuple en révolte et un cataclysme d'une force inouïe. Arrivés de l'autre coté de la falaise ils perçoivent un terrible grondement et un gigantesque rougeoiement qui embrase l'horizon. Après plusieurs jours d'une marche forcée, ils trouveront le salut dans une providentielle caravane de thé qui les ramènera à la civilisation. Seule la princesse Arkaïa sera le témoin vivant de cette extraordinaire aventure.
Le constat d'un échec
Cet ouvrage trouverait parfaitement sa place dans une étude du style « La S.F à la lueur d'une lampe à pétrole ». En effet si la thématique peut sembler intéressante au premier abord, elle s'enlise vite dans une « Robinsonnade » qui hélas tombe à plat. Le roman de Pastre est parfaitement divisé en deux parties. La première, très alléchante et prometteuse nous apporte son lot de savant génial et d'inventions merveilleuses. Les idées sont classiques (omniprésence de l'électricité comme énergie révolutionnaire) mais la datation du roman nous laisse présager certaines innovations dans le domaine.
Toutefois il nous faut émettre un petit bémol, car le transport des « fluides » électriques fut déjà largement exploité entre autre dans l'ouvrage de Henry Barbot « Paris en feu, Ignis Ardens » en 1914. Le « Palernium » nous est présenté comme une nouvelle matière exceptionnelle et dont les propriétés de légèreté et de résistance, nous révèlent bien l'importance à cette époque de doter les avions de matériaux innovants afin de les rendre plus performants. A cette époque beaucoup d'auteurs utiliseront ce moyen de transport comme l'aboutissement d'une certaine technologie et de la marque du triomphe de l'homme sur le progrès.
Le second volet, nous plonge également dans une autre thématique chère à nos auteurs de conjectures avec la découverte d'une ancienne civilisation, ayant vécue en autonomie complète parce que totalement isolée du reste du monde. Un ouvrage de plus à ranger dans la catégorie « Mondes perdus » avec ici également une certaine réserve quand à l'originalité du développement de l'intrigue. En réalité, c'est ici que l'auteur s'enlise nous prouvant un certain manque d'imagination. A l'endroit où Lermina/Robida nous comblèrent d'un époustouflant « Mystére-Ville », Pastre de son coté nous plonge dans une société archaïque où rien n'a évolué, où les maisons ne possèdent même pas de vitres aux fenêtres. Pas l'ombre des « Douches phoniques » et des « serres photophoniques » qui nous avaient enthousiasmé dans le texte de William Cobb.. Cette antique civilisation Gréco-romaine se figea littéralement sans essayer d'améliorer son quotidien.
La faute en incombe peut-être au Sénat, préférant une société d'incultes, plutôt que de lutter contre une assemblée de savants. Je pense fortement que l'auteur ne possédait pas au moment de la rédaction de ce roman la verve et l'imagination délirante de biens des auteurs qui lui succédèrent (pourtant il s'agit là de son meilleur roman à mon goût). Par moment nous avons vraiment l'impression que le talent de certains auteurs de cette période, redoutaient une forme de « quand dira t-on » ou de « ce n'est pas trop sérieux d'écrire de telles énormités » (voir article sur le prix « Jules Verne »). Il existait réellement un cloisonnement dans le « scientifiquement correct » (fort heureusement il y a de magnifiques exceptions).
Beaucoup d'auteurs ne possédaient pas cet esprit à la fois technique et imaginatif, permettant de créer une technologie nouvelle, basée sur des données différentes. Pourtant bons nombres de précurseurs donnèrent le ton juste et il manqua certainement la petite étincelle suffisante et indispensable à créer une réelle dynamique. Héla une preuve supplémentaire que dans le contexte de l'époque il était très difficile de concevoir de nouvelles cultures et une idéologie radicalement opposée aux grands courants de l'évolution des espèces. En résumé des esprits inventifs mais cloisonnés par une imagination parfois un peu trop étriquée. Pour preuve cette dualité si timide entre le bien et le mal, science et sagesse, semant le trouble dans la ville d'Arkaïa.
Voilà pourquoi en dépit d'un argument résolument conjectural, celui-ci reste malheureusement victime de son époque et rédigé d'une main hâtive à la lueur tremblante d'une lampe à pétrole. Des idées intéressantes mais fragiles et rétrogrades, trop peu puissantes pour percer les ténèbres de la science. Fort heureusement, le domaine est vaste, une grande partie reste encore à explorer, et la découverte de territoires insoupçonnés plus que probable.
Sur L'auteur
Les quelques renseignements qui suivent proviennent d'un article de Jean Luc Buard que l'on trouvera dans la revue « Le Petit Détective » N°8, Septembre 1991. Article précédé d'une analyse sur « L'étrange aventure de Pierre Fontramie ». Ce qu'il y a d'intéressant c'est que nous arrivons à peu-prés à une conclusion identique concernant les qualités littéraire de l'ouvrage : des idées mais mal exploitées et abordées très timidement, donnant à l'ensemble un arrière goût d'inachevé pour ne pas dire de bâclé.
J.L Gaston Pastre, Jules Louis de son prénom est probablement originaire du Sud de la France, de Montpellier semble-t-il. Cet auteur sera connu grâce à l'obtention du convoité « Prix jules Verne » organisé par la célèbre revue « Lecture pour tous ». Suite à cette récompense, l'auteur produira la majeure partie de son œuvre conjecturale pour cette dernière et l'on perdra toute trace de l'homme et de sa production en 1939.
Visiblement passionné d'histoire, il rédigea plusieurs ouvrages sur Napoléon et un autre sur la restauration. Marqué par la première guerre mondiale, on compte également dans sa bibliographie au moins trois volumes dans ce domaine. En regard de sa production « conjecturale » il est possible de noter une constance dans sa thématique : L'avion et le bateau. Une très grande partie de sa « fibre anticipatrice » se concentrera sur les possibilités à perfectionner les moyens de transport aériens ou maritimes, bien que par moment il tentera d'associer les deux comme dans « Le palace à la dérive ». Mais ses perfectionnements aussi « classiques » qu'ils soient (ce genre d'évolutions techniques sont relativement courantes dans la productions de l'époque) il est intéressant de noter qu'elles servent bien souvent la folie des hommes et faire progresser la machine de guerre.
Quand à l'éditeur, dont il est assez rare de rencontrer la production, était une revue mensuelle de littérature et de sciences, créée en 1905 à Aix en Provence, qui publia d'après mes recherches de nombreux ouvrages sur le régionalisme et la tauromachie.
Bibliographie des œuvres de J.L.Gaston Pastre
- « L'étrange aventure de pierre Fontramie ». Société de la revue Le Feu.1920.
- « La neuvième croisade » Ouvrage répertorié par Jacques Van Herp. Editions Plon-Nourrit &Cie. 1926. Parution en pré-original dans la « Revue Indépendante » ?
- « Le secret des sables » de J.L.Gaston Pastre. Edition pré- originale dans la revue « Lecture pour tous » Juin/Juillet/Août 1928. Illustré par G.Dutriac. Réédition en volume « Collection prix Jules Verne ».1928. Illustré par G.Dutriac. Réédition « Lisez moi aventure » N°46 (15Mars 1950) N°46 (1 Avril 1950) N°47 (15Avril 1950) N° 48 (1 Mai 1950)
- « La ville aérienne » Librairie Hachette. Bibliothèque verte, nouvelle bibliothèque d'éducation et de récréation. 1928.
- « Le palace à la dérive » Librairie Hachette.1929.
- « Les puits tragiques » dans la revue « Lecture pour tous » Août/Septembre/Octobre 1932.
- « Les pirates de la Hanse » dans la revue « Lecture pour tous » Juin 1936.
- « L'île Z » dans la revue « Lecture pour tous » Juillet 1936.
- « Le capitaine Alvez » dans la revue « Lecture pour tous » Septembre/Octobre/Novembre 1937.
- « Le grand complot de 1950 » dans la revue « Lecture pour tous » Janvier 1938.
- « Le capitaine Alvez » Les éditions des Loisirs « Loisirs/Aventures. 1939.
- « Les avions de la mort (roman de la guerre future) » dans la revue « Lecture pour tous ». Mars/Avril/Mai 1939.
- « Les sous marins fantômes » dans la revue « Lecture pour tous » Novembre/Décembre 1939, Janvier 1940.
Reste à savoir ce que renferme des titres aussi mystérieux que :
- « Sous les griffes du mandarin » éditions Hachette.
- « Une étourdissante aventure » éditions Tallandier.
- « L'amour sous le masque » éditions Tallandier.
- « L'île d'épouvante » éditions Tallandier.
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